(Ce texte de François Falardeau a été originalement publié dans le Bulletin mensuel de l’Amicale généalogique Falardeau, volume 1, numéro 6, juillet 2008.)

Alain Blaise, un ami qui m’accompagnait lors de mon voyage à Bignay, me présente deux autres hypothèses sur l’origine du nom Falardeau, ou Follardeau, puisque c’est bien ce nom que portaient nos ancêtres avant leur arrivée en Amérique.

Il part d’abord du fait que, malgré de longues recherches sur Internet, il a trouvé très peu, sinon aucun nom dont l’origine serait double. Rappelons que, tant dans l’hypothèse proposée par le généalogiste Émile Falardeau que dans une des hypothèses récentes de monsieur Roland Jacob, auteur de Votre nom et son histoire, on retenait l’hypothèse d’un élément d’origine gauloise auquel s’ajoutait un élément d’une autre origine (latine pour Émile Falardeau, germanique pour Roland Jacob). Alain cherchait donc une hypothèse plus simple, avec une origine unique pour les deux premiers éléments. Pour le diminutif eau de la fin, les explications de monsieur Jacob (« ces suffixes diminutifs ont un double sens. Ils ont une simple valeur affective ou ils marquent la filiation ») ne sont pas remises en question.

À la base de ses deux hypothèses, Alain part aussi de l’idée que Follardeau, écrit avec deux l, pouvait très bien, à l’origine, se prononcer comme les deux l collés en espagnol, soit l’équivalent du y français, donc prononcés Fo – y – ardeau. La Saintonge, située aux confins des deux grandes influences linguistiques que furent la langue d’oïl (nord) et la langue d’oc (sud), peut très bien avoir emprunté cette prononciation à la langue d’oc. Voici donc les deux hypothèses présentées par Alain Blaise.

Feuillard

La première vient rejoindre, tout en l’expliquant plus précisément, celle du professeur Narcisse-Eutrope Dionne qui, dans un ouvrage publié en 1914 sur les origines de nos familles, suggère l’idée que le patronyme découle de l’appellation de la commune de Feuillardais, située dans l’actuel département de Loire-Atlantique. Dans Le Trésor de la langue française informatisé, dans Internet, au mot feuillard, on trouve comme sens :

  • Branche garnie de feuilles; ensemble de branches avec leurs feuilles. Certains dictionnaires généraux mentionnent un emploi spécial au sens de « branches garnies de feuilles utilisées pour l’alimentation des animaux ».
  • TONNELLERIE : Branche refendue de châtaignier ou de saule utilisée pour faire les cerceaux de tonneaux. Attesté par la plupart des dictionnaires généraux. Par analogie : Feuillard de fer, d’acier, ou, par ellipse du déterminant, feuillard. Bande de fer ou d’acier, étroite et mince, servant à cercler des tonneaux, des pièces de bois, à renforcer des emballages.
  • Nom qu’on a donné jadis aux voleurs qui se tenaient dans les bois.

Dans le Glossaire du parler français au Canada dans Internet, on reprend le second sens, soit des cercles de fer pour les tonneaux, en précisant que ce sens provient de la Saintonge. Se pourrait-il donc que nos ancêtres aient été des fabricants de feuillards, donc des feuillardiers ? Chose certaine, les vignobles étaient nombreux à Bignay et dans les alentours aux 16e et 17e siècle, soit avant l’arrivée du phylloxéra, une maladie de la vigne qui a détruit la majorité des vignes françaises.  Notons en passant que Pierre Follardeau, époux de Marie Tabois, probablement un cousin éloigné, possédait en 1674 une métairie au village des Audouins à Bignay « consistant tant en maisons grange que bois vignes chans labourables et autres appartenances et deppendances sans aucune reserve laquelle mesterie raportant sera receu a venir a partage avec ses freres et sœurs apres le deces dudit Follardeau » (Extrait du contrat de mariage de son fils Pierre avec Isabelle Prieur).

Et si notre ancêtre n’était pas un feuillardier, ne pourrait-il pas avoir été un « voleur qui se tenait dans le bois », émule de Robin des Bois ? Mentionnons en terminant que le mot feuillard, en lien avec le cerclage, est encore utilisé aujourd’hui, comme le montre entre autres cette photo prise sur eBay :

Cercleuse à feuillard

Fayard

Une seconde hypothèse donnerait comme origine le mot foyard, duquel est dérivé le mot fayard. Pourquoi ce foyard n’aurait-il pas pu évoluer, dans l’écriture, vers follard, toujours prononcé fo – y – ar? Fayard est un terme signifiant hêtre, qu’on retrouve encore aujourd’hui dans le sud de la France. Le Robert donne comme exemple un texte de Jean Giono, écrivain français célèbre né en 1895 à Manosque, dans les Alpes-de-Haute-Provence, et décédé au même endroit en 1970 : « Voilà autour de lui les fayards et les rouvres. » En Suisse, on a même conservé la graphie foyard comme équivalent de hêtre.

On revient ainsi par une autre voie à la dernière hypothèse de monsieur Roland Jacob, pour lequel Follard pouvait être un lieu-dit, « lieu de la campagne qui porte un nom traditionnel et sert de repère faute de hameau » (Dictionnaire Robert), où poussait un hêtre majestueux. L’ancêtre Follardeau aurait pris le surnom de Follard, devenu ensuite son nom, parce qu’il habitait près de ce lieu-dit. Voilà donc deux hypothèses à ajouter à celles déjà existantes. Qui dit mieux ?