par François Falardeau
D’abord, un grand merci à Pauline Robichaud, qui m’a non seulement mis sur la piste mais fourni la plupart des informations contenues dans ce texte.
Quand on lit une nouvelle comme celle de la découverte de 215 tombes potentielles de jeunes Indiens sur le terrain du pensionnat Kamloops Indian Residential School, on peut se désoler, trouver cela inacceptable, mais on se dit aussi que c’est bien loin de nous. Pourtant, il y a un lien entre nous et ces décès : des membres d’au moins une famille de Falardeau ont été pensionnaires à cet endroit.
Les Residential Schools
D’abord un mot sur ces pensionnats. Je cite Wikipédia : « Les pensionnats autochtones, pensionnats indiens, ou écoles résidentielles, étaient une forme d’enseignement public en internat destiné aux Autochtones au Canada. Au cours du XXe siècle, le Département des Affaires Indiennes encouragea le développement des internats pour autochtones afin de favoriser leur assimilation. Cette pratique, qui séparait les enfants de leur famille, a été décrite comme le fait de « tuer l’indien dans l’enfant ». Bien plus que des écoles, ces pensionnats étaient des « centres d’endoctrinement culturel » selon Murray Sinclair, président de la Commission vérité et réconciliation. »
La direction ainsi que les membres du personnel étaient-ils conscients des vies qu’ils brisaient en coupant les cheveux des enfants à leur arrivée, en leur interdisant de parler leur langue, en les éloignant de leur culture, etc.? Sans doute au moins en partie, bien qu’on puisse penser que certains membres des autorités civiles et religieuses étaient de bonne foi. Et à cela s’ajoutaient les agressions physiques et sexuelles, hélas trop nombreuses, ainsi que les conditions de vie propices à l’apparition de nombreuses maladies. Pas étonnant que lors de la Commission vérité et réconciliation, on ait parlé de plus de 4000 enfants morts dans les pensionnats (certains avancent même le chiffre de 6000). Ce sont ceux-ci que nous sommes en train de découvrir, pensionnat par pensionnat (il y en a eu 39 au total).
Je cite de nouveau Wikipédia : « Cette institution a laissé des séquelles très graves sur les peuples autochtones : loin de leur famille et de leur communauté, sept générations d’enfants autochtones ont été privés de leur identité à la suite d’efforts systématiques et concertés visant à anéantir leur culture, leur langue et leur esprit. Ce système a porté atteinte à leur respect de soi et a miné leur capacité à s’occuper des tâches quotidiennes de la vie. »
Le pensionnat de Kamloops, fondé en 1890, accueillait jusqu’à 500 élèves dans les années 1950. Il a été transformé en école de jour en 1969 et a fermé ses portes en 1978. C’est en mai 2021 que les restes de 215 enfants inhumés dans des tombes anonymes ont été mis au jour sur le terrain du pensionnat, grâce à l’utilisation d’un radar à pénétration de sol.
Des Falardeau au pensionnat de Kamloops
Cela dit, revenons à nos Falardeau. Au moins une famille, dont deux Falardeau et leur demi-sœur, a été identifiée pour le moment. Mais comme la famille a compté au moins neuf enfants, on peut croire que d’autres membres de celle-ci ont également fréquenté le pensionnat de Kamloops.
La famille
Comme nous l’avons dit, cette famille comprenait au moins neuf enfants, dont la mère est Frances Casimir. Frances était la fille de David Casimir, chef de la première nation Simpcw, et de Lizette Andrew. Née le 3 mai 1914 dans la réserve indienne North Thompson, en Colombie Britannique, elle est décédée le 1er janvier 1960.
De son premier mariage avec Hubert La Rue, le 29 août 1932 à Chu Chua, Frances a eu au moins une fille, Caroline, née en 1934. Puis, elle a épousé Samuel Falardeau, avec qui elle a eu au moins huit autres enfants.
Voici les enfants nés de l’union entre Samuel et Frances :
- John Edward, né en 1939 et décédé le 9 janvier 1986;
- Christine Adeline Rose, née en 1942 et décédée le 26 octobre 2015;
- Louis Casimir, né en 1943 et décédé le 8 septembre 2007;
- Albert George, né et décédé en 1945;
- Jacquie, garçon décédé avant 2007;
- Nellie, fille décédée avant 2007;
- Leonard;
- Florence.
Je ne connais pas l’année de naissance des quatre derniers mentionnés. Nous savons par leur avis de décès que Caroline La Rue, Christine Adeline Rose Falardeau et Louis Casimir Falardeau ont fréquenté le pensionnat de Kamloops. Y en a-t-il eu d’autres? On peut le croire si on se fie à leur âge et au fait que le pensionnat a fonctionné jusqu’en 1969. Mais je n’ai pas trouvé de telle mention pour les autres, dont deux, Florence et Leonard, étaient encore vivants en 2018.
Voici quelques informations tirées des avis de décès des trois « survivants », comme on les appelle dans leur avis.
Caroline La Rue
Caroline La Rue est l’aînée de cette famille reconstituée. Elle est identifiée à son décès comme « survivante du Kamloops Indian Residential School ». Conjointe de Clarence Fortier, elle a eu au moins neuf enfants, dont six vivants au moment de son décès en 2018, où on mentionne cinq petits-enfants, quatre arrière-petits-enfants et même un arrière-arrière-petit-enfant.
On dit qu’elle était toujours préoccupée du bien-être de son entourage et de sa communauté. Elle agissait comme gardienne auprès de très nombreux enfants. Elle aimait le sport, et elle aurait déjà réussi un coup de circuit sur un coup retenu! Elle aimait cuisiner, confectionner des vêtements, observer les oiseaux.

Christine Adeline Rose Falardeau
Christine Adeline Rose, née en 1942 et décédée le 26 octobre 2015 à Kamloops, est également identifiée à son décès comme survivante du pensionnat de Kamloops. Épouse de Richard Phillips, elle a eu cinq enfants. On dit qu’elle aimait beaucoup les longues marches, pouvant se qualifier pour l’équipe olympique de marche rapide! Elle s’est beaucoup occupée de sa sœur Florence, après la mort de sa mère, et est restée très proche de sa famille qu’elle visitait régulièrement.

Louis Casimir Falardeau
Louis Casimir Falardeau est né en 1943 et est décédé à Kamloops le 8 septembre 2017. Artisan de talent, il a notamment sculpté un totem qui se trouve à l’entrée du Tum Tum Trailer Park à Vavenby. Il participait également à des concours de châteaux de sable. Il ne semble pas s’être marié ni avoir eu une descendance.
Descendants de Louis François
Qui est ce Samuel Falardeau, qui a épousé la fille du chef d’une tribu indienne? Né en 1914 et décédé en 2004, il est le fils de Basile Falardeau et de Christine Jules.
Mais remontons d’abord un peu dans le temps. Comme nous le savons, notre ancêtre Guillaume a eu neuf enfants, dont six garçons; le quatrième est Louis François. Joseph Marie, deuxième enfant de celui-ci, a eu 15 enfants, dont 10 avec Charlotte Rainville ou Drainville. Quatre de ceux-ci nous intéressent parce qu’ils ont eu une descendance dans l’Ouest canadien : Joseph Michel, Hyppolithe (mon arrière-arrière-arrière-grand-père!), Amable et Louis. Plusieurs de leurs descendants ont épousé des autochtones, leurs enfants faisant donc partie du groupe important des Métis de l’Ouest. Je m’en tiendrai pour ce texte à la lignée qui aboutit à Samuel :
- Samuel, fils de Basile et de Christine Jules;
- Basile, fils de Louis et de Matilda Kounkounamilrken;
- Louis, fils de Michel et de Jenny Lucie;
- Michel, fils de Jean Michel et ?;
- Jean Michel, fils de Joseph Marie et de Charlotte Rainville ou Drainville;
- Joseph Marie, fils de Louis François et de Marie Élisabeth Gervais;
- Louis François, fils de Guillaume et de Marie Ambroise Bergevin.
C’est ainsi que des Métis issus de Québécois francophones émigrés dans l’Ouest canadien ont subi les efforts pour « tuer l’indien en eux ». Quelle triste histoire!